...impossible d'avoir la même attitude sur le blog que dans un carnet personnel...
Salut Maxime, Tu fais partie de la catégorie des bloggers "nouveau au bataillon". Qu'est-ce qui t'as pris ! ouvrir un blog ?
Je pense que l'idée, fantastique, de pouvoir réfléchir à haute voix dans le silence fantomatique de la toile m'a convaincu. De plus, étant un lecteur assidu du blog de
Mistral, j'ai sûrement forgé ce désir inconsciemment. Puis, et c'est sûrement la raison la plus évidente, j'étais fatigué de traîner des heures sur des sites, à consulter n'importe quoi. Maintenant, j'ouvre l'écran et je sais que je peux simplement écrire, si j'en ai envie. Que d'autres me lisent, tant mieux, mais ce n'est pas mon but ultime.
Tu veux dire que ton blog ne s'adresse ! personne ! part toi ? Même pas ! des amis et proches ?
Non, surtout pas. Mon blog s'adresse à tout le monde, et c'est justement ici que se joue la notion de solitude, de silence. N'importe qui, ça veut aussi dire l'invisible, le nada. Bien sûr, mes proches sont au courant de mon activité, et me lisent. Ça leur permet de prendre des nouvelles, mais je répète, des nouvelles silencieuses, qui ne pourront être objets dialectiques. Des dards, en quelque sorte. Et la toile est ma cible.
Par exemple. Mon père a lu mon envoi hier. Il a tout de suite appelé chez moi pour savoir si je continuais mes études. Bien sûr que oui, compte tenu de mon masochisme indécrottable. Mais c'est de ce genre d'incidents qu'est tributaire le soliloque du bloggeur.
Tu en aura des dans le "mille" en envoyant des dards sur la toile :-) Tu as évoqué tes promenades sur cette même toile. Longues et diversifiées ?
Je crois que Montréal est résolument une ville de marcheurs, de vampires pourrait-on dire. Le calme magnifique qui y règne en fait un paradis pour le pacifique utopiste que je suis. Contrairement à l'Europe, où la notion de territoire est très présente, vu l'espace qui vous est alloué et la quantité de gens qu'il faut y mettre, le Québec est un désert. C'est pourquoi tant de juifs errants y prolifèrent. La nuit, il faut la boire, et le jour, le fumer. Ma vie parfaite serait ma vie absente. Déambulatoire et sans but précis.
La pensée se fait peut-être dans la bouche, comme le disait Dada il y a presque un siècle. Je crois qu'elle se fait aussi en marchant. Cette notion du marcheur rejoint pour moi celle de l'étranger, de l'homme sur le seuil. Le monde moderne est fait d'intérieurs et d'extérieurs. Dans les intérieurs, les initiés, et dans les extérieurs, les étrangers. Rappelons-nous le Château, de Kafka. Rien de plus symptomatique au 20e siècle. Alors, finalement, le blog serait ce Château, où rien ne peut être acheminé autrement qu'à Dieu, qu'à l'entité invisible que représente l'écrivain. Ses mots, oui, traverseront jusqu'à l'écran, comme des formalités. Mais lui-même en est absent.
Je parle de tout ceci avec ma typique ferveur romantique et pubère. Être Breton ou rien, voilà mon adage. Il est certain que le blog n'a pas cette signification par lui-même, que c'est moi qui le vois à travers des yeux maléfiques. Je suis comme ça.
Quelle est la relation entre tes carnets papier et ton blog ? Même contenu pour les deux ?
C'est impossible. Je dois avouer que j'écris de moins en moins sur papier. Mais c'est impossible d'avoir la même attitude sur le blog que dans un carnet personnel. Quand j'écris sur La chandelle verte, je suppose que quelques personnes me lisent, donc au moment où j'écris, je suis conscient que je suis obligé de montrer ce que je suis en train de composer. Cela a une incidence très forte sur ce que je choisis de taire, et ce que je choisis de dire. Ce n'est d'ailleurs pas la 1re fois que je m'adonne à l'autobiographie, ou l'auto-fiction. J'ai raconté des épisodes de mon enfance une fois, mais ce fichier est caché dans le ventre du Ibook. Je ne vois pas l'intérêt que cela pourrait représenter aux yeux des lecteurs éventuels.
Pour ce qui est du papier, je crois fermement que c'est appelé à disparaître, en tant que laboratoire pour l'écrivain. L'ordinateur, comme la Remington dans les années 50, offre à l'écrivain une efficacité incomparable. Le papier, ça devrait être réservé aux mots d'amour et aux livres.
Tu ne crois pas qu'il faut laisser aux lecteurs le soin de savoir quel intérêt présente pour eux tel ou tel texte ? Ce n'est pas impossible qu'il y ait un lectorat pour tes histoires d'enfant. Tu ne le saura que quand tu les aura présentées.
Quels sont les bénéfices que tu attends de la Chandelle Verte ? J'utilise le terme bénéfice au sens très large
Bénéfice... Je ne sais pas trop. Si je peux intéresser des gens, par mon écriture, c'est tout ce que je souhaite. Je n'ai jamais publié encore, mais j'espère bien le faire dans la prochaine année. Pour l'instant, des projets comme la Chandelle Verte me permettent de former un proto-lectorat. Et en même temps, à me permet de faire le deuil des textes.
La phrase en clé, que j'ai posté ce mois-ci, est un texte sur lequel je travaille depuis presque un an. Le fait de l'afficher sur la Chandelle le stigmatise. Je n'ai plus envie d'y toucher.
J'ai l'habitude de demander aux habitués des blogs quels seraient les conseils qu'ils donneraient aux nouveaux. Il est évident que la question n'est pas pour toi, même si tu as quelques beaux post à ton actif déjà. Je demanderais plutôt : Qu'est ce que tu as grappillé chez les autres comme idées avant de te décider ?
De
Mistral, j'ai gardé l'élision et le goût du jour. D'
Anne Archet, l'inspiration anarchique. De
Lady Guy, ses rapports toujours surprenants. D'Old Cola, malgré le fait que je n'en sois pas digne, la vision périphérique et l'observation minutieuse.
Ce qui me distingue, je crois, de ces quelques maîtres, est mon goût du théorique et du poétique. Malgré le fait que Mistral soit constamment sollicité, à travers ses proses, par sa poésie, qui sous-tend tout le reste, il ne poste pas systématiquement ses vers sur la toile.. Dans son cas, c'est un choix éditorial, je dirais. Encore une fois, une de ses forces est sa capacité à faire l'élision des pans de vie qu'il ne tient pas à garder, dans un but littéraire. Ce que je veux faire, moi, c'est l'élision des pans de littérature que je veux remplacer par la vie. Ainsi, mise à part La phrase en clé, mes poésies sont écrites sur le champ. Et c'est pourquoi je ne tenterai jamais de les publier ailleurs. Elles sont approches de la vie, tant et si bien qu'elles ne pourront s'inscrire dans une oeuvre à proprement parler. Elles sont là comme autant de portes vers une pensée poétique, qui est la mienne, si jamais pensée poétique je détiens.
Entre temps, je tenterai de m'en fabriquer une de secours, au cas où les vers ne viendraient jamais trouer les pages d'un livre encore à venir.
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